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J'ai testé pour vous... les patins à roulettes!


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Les patins à roulettes de Taryn, correspondante pour Jura Synchro en Grande-Bretagne.

Bien qu'attendue en cas de pandémie, la fermeture des patinoires a tout de même été un réel choc. Un choc à la fois sportif et émotionnel. Et puis une certaine anxiété s'est installée: certains ont vu leurs revenus entièrement réduits, d'autres qui se sont entraînés toute leur vie pour une compétition se retrouvent soudainement privés de leur moment tant attendu, ou encore ceux dont la vie tourne autour de la patinoire. Ceux pour qui la glace est une évasion, une passion. C'est finalement comme perdre un peu une partie de soi. Quelle solution est apparue? Les patins à roulettes!

Je n'avais jamais pensé, ni même songé un seul instant qu'un jour, mon pays (et beaucoup d'autres) allait être verrouillé. Et surtout, je n'avais pas préparé les outils nécessaires. Pas de vieilles bottines à réutiliser. Et certainement pas de roulettes. J'ai donc dû acheter les deux et inévitablement, je n'ai pas été la seule à avoir cette idée. Au moment où j'ai commencé mes recherches, les sites des ventes étaient complets et aucun réapprovisionnement n'était attendu avant juin. J'ai passé des heures et des heures à faire des recherches sur internet. Quels types de patins pourraient s'avérer similaires au patinage sur glace? Un ami a recommandé une marque et un groupe Facebook en a suggéré une autre. Le problème était qu'il n'était pas facile de trouver un vendeur. En plus, je devais aussi me trouver de nouvelles bottines.

Finalement, c'est dans un magasin en Italie que j'ai trouvé mon bonheur. Encore mieux, ils proposaient des patins déjà montés. J'ai entré les détails de ma carte bancaire en essayant d'ignorer le prix, mais je me suis quand même convaincue de compléter l'équipement avec des coudières et les genouillères que j'ai trouvées sur Amazon. Avec le recul, cet investissement fut très utile.

Une semaine plus tard, une paire de bottes blanches brillantes avec d'étranges roulettes sont arrivées derrière ma porte. Il faisait déjà nuit, j'ai donc dû me contenter d'attendre le lendemain pour les essayer. Le lendemain, je me suis levée très tôt pour tester mes nouveaux patins. Aussitôt debout, je me suis surprise de la sensation, j'ai commencé à rouler dans la rue et suis tombée illico presto sur mes fesses. Après avoir rassuré la vieille dame qui vit en face de chez moi que j'allais bien (ce qui était d'ailleurs très embarrassant), j'ai finalement pu me relever et rejoindre la partie plate de la route.

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Ayant déjà patiné avec des patins à roulettes sans aucun problème, je pensais pouvoir utiliser mes nouveaux achats tout de suite. Mais non, c'était différent. Ces patins-là étaient plus hauts. Je me sentais comme sur des échasses. Ces patins n'ont que 3 roues, donc c'était plutôt compliqué. Et c'était périlleux de tourner. Et puis, il y avait la bottine elle-même. La cheville était beaucoup trop haute et ces bottines étaient neuves! En fait, j'avais l'impression de redevenir une patineuse débutante en me souvenant de la douleur des nouvelles bottines. J'ai commencé par des exercices abordables; des slaloms sur deux pieds, ou encore des poussés en utilisant les mêmes méthodes que j'utilise dans les cours Learn to Skate. L'adaptation n'a pas été facile. Je ne me suis certainement pas filmée et n'ai pas mis de vidéos sur les réseaux sociaux. Ce que je n'avais pas non plus pris en compte, c'est l'effort qu'il faut pour pousser sur les roues par rapport à sur la glace. J'ai tenu environ 15 minutes puis je me suis arrêtée.

Étonnamment, le lendemain, je me sentais beaucoup plus confiante. Je pense que mon cerveau avait besoin de temps pour recalibrer l'équilibre. Cependant, chaque étape, chaque virage a dû être retravaillé de manière différente. Un autre problème était de pouvoir s'arrêter. L'habitude de la glace restait à l'esprit. Pour ma part, j'aime les arrêts rapides et nets comme au hockey sur glace. Ces stops ne sont PAS transférables sur le béton. Je me suis en effet retrouvée par terre plusieurs fois. Mes coudières se sont pliées, heureusement qu'elles sont robustes et qu'elles couvrent la majeure partie de mon bras. 

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Ce que je n'avais pas anticipé, c'était les twizzles. Un tour, ça allait, même depuis l'arrière, mais plus qu'un tour s'avérait être très difficile. Sur la glace, les twizzles sont à la fois mes adversaires et mes meilleurs amis. Pour moi, il n'y a pas de meilleure sensation qu'un twizzle bien exécuté. J'ai donc pensé que j'allais essayer sur le béton. Mais hélas, sans succès.

J'ai regardé beaucoup de vidéos sur YouTube, ce qui m'a prouvé que c'était possible de le faire. L'aide la plus utile est venue du patineur Adam Jukes. Ayant remporté les Championnats du monde de patinage sur roulettes (Open Inline) en 2019 et étant également un ancien patineur artistique, j'espérais qu'il pourrait expliquer ce que je faisais de faux avec mes twizzles. Comme tous les entraîneurs que j'ai jamais eus sur Zoom, il m'a ramené à l'essentiel, a grimacé sur la position de mes jambes, m'a rappelé de revenir à l'essentiel et soudain "boum", je pouvais tourner.

Apparemment, le twizzle est plutôt fait pour être exécuté sur une surface plane et lisse où il n'y a pas de pierres. Bon, j'ai décidé de mettre cela de côté jusqu'à ce que je trouve l'endroit idéal pour m'y entraîner.



Et puis, j'ai découvert un parking. La surface est pleine de trous et elle est étonnamment un peu vallonnée, mais l'espace est libérateur. Je me suis énormément amusée, prenant possession de l'endroit, améliorant mon endurance et mes lignes. Qu'est-ce que ça fait du bien!

Actuellement, j'enseigne à la fille de mon amie à patiner avec des patins à roulettes car c'est la seule activité qui la fait sortir de la maison. Elle venait de commencer à apprendre à patiner lorsque le lockdown a débuté. Toutefois, j'espère qu'au moment où elle fera son retour sur la glace, elle maîtrisera les bases du patinage et pourra peu à peu espérer rejoindre une équipe de synchro.

Un jour, nous patinions sur le parking et une patrouille de police est arrivée et nous a interpellés. Les policiers nous ont demandé si nous étions des patineuses. Ils nous ont ensuite informés qu'un autre groupe de patineuses s'entraînaient dans un parking voisin et qu'elles faisaient exactement la même chose. J'ai appris qu'il s'agissait de membres d'une équipe locale de synchro pour adultes! Le monde est petit, non?



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Le patin à roulettes, bien sûr, ce n'est pas la même chose que sur la glace. Je ne peux pas m'entraîner au même niveau, je ne peux pas sortir quand le sol est mouillé et évidemment le contact social me manque. Mais c'est une compétence à part entière.

Qu'importe combien de temps nous devrons vivre avec cette «nouvelle normalité», lorsque je retournerai sur la glace, je continuerai le patinage à roulettes car quand mêmes... il y a quelque chose de magique de pouvoir patiner dehors au soleil.